D’Armando Della Vittoria
Dans le nouveau travail d’Armando Della Vittoria, alias Gabriele Di Matteo, alias Armando Della Vittoria & Co… nous trouvons le sens du travail… justement dans ce « & Co ».
Les « Co » correspondent à : Compagnie, Compagnons, Complices, Collègues, Co-écrits, Convaincus, Circonscrits, Commis, Conscients, Constants, Contraires, Cultivés, Couards, Créatifs, Confirmés, Crétins, Chrétiens, Crétins à nouveau, Crédules, Cruels, Charpentiers, Croix rouge, Crucifix…, Cuisiniers, Cultivateurs, Camionneurs, Communistes, Che Guevaristes, Chlorophylle, Chrysanthèmes, Candélabres, Cajoleurs, Curateurs, Couscous, Clans, Clavecinistes, Cocus, Coups de poing, Chicaniers, Céphalées, Célébrateurs, Cerveaux, Concessionnaires, Cocorico, Chiropracteurs, Chinois & Cerises.
Comme d’habitude… le problème est toujours le même dans le travail de Gabriele Di Matteo : le Concept d’Auteur.
Cette fois, avec « Amici miei » qui donne le titre au projet tout en révélant ses auteurs à travers un « Cadavre exquis », Gabriele Di Matteo délègue l’image à divers Co-Auteurs… ses amis justement, se prêtant au jeu du mélange des cartes de l’auteur. La question est la suivante et vient de loin : si chacun d’entre eux participe, sont-ils tous auteurs ? Ou bien l’auteur n’est-il peut-être que notre Breton ou Tzara qui ont eu l’idée ? Ou alors est-ce dans la délégation que réside le sens de l’art (pour le moins pour Breton – Della Vittoria) ? Chaque ami-artiste se prête à ce « jeu » de liberté, mais au moment où il s’apprête à placer son intervention dans le carnet Moleskine, il ne peut s’empêcher de regarder la page précédente. Trichant avec les règles du « Cadavre exquis », l’artiste dans sa totale liberté d’intervention est en relation avec les pages précédentes, avec la responsabilité d’être un « & Co »… de Di Matteo, gardant toujours à l’esprit qu’alias Armando Della Vittoria cachette chaque verso de page exécutée ; on continue à se demander si la signature est le travail ou si le travail est la signature.
Sur la couverture de « Amici Miei » à côté de « Ceci n’est pas Magritte » (où René refuse d’apparaître en tant qu’auteur), nous retrouvons le jeune peintre Zaccaria Di Matteo qui ouvre le jeu en intitulant l’ensemble du travail ; il est suivi par l’ami peintre Miltos Manetas, avec un dessin envoyé par mail au cours d’un voyage entre New York et Stockholm, puis par Giovanna Francesconi, chef de file de l’équipe Pollock avec Pier Paolo Pasolini. Vient ensuite de Chine avec amour 34567 qui se place, comme de juste, avant l’intervention de Federico Luger – jeune artiste expressionniste de Caracas et galeriste de Di Matteo – avec 67890. Suivent l’intervention de Loredana Dilice, qui copie le dessin de Zaccaria de « Amici Miei » dans un parfait style Di Matteien, puis Salvatore Russo et Salvatore Testa, avec une copie d’un autre travail chinois, posant ainsi à nouveau le problème du concept d’auteur (mais il ne fallait pas perdre les étapes précédentes)… Franco Silvestro lève le masque de Vedovamazzei et Antonio Funicola, avec ses mariées sans alliance, devient prestidigitateur de dimensions. Nicola Di Caprio dans un dessin/collage avec une « odeur de vin » virtuelle, puise dans l’imaginaire de l’art et de la musique. Parmi les serpents vénéneux et les cactus, Shannon Pultz et Ralph Taviato nous saluent depuis la 19° heure de fuseau horaire, tandis que d’autres chaleureuses salutations arrivent de Patterson Beckwith… et pour finir un travail de 1986 d’Armando Della Vittoria, devenu lui aussi un Co.
Tous « Mes Amis » comme disait un célèbre chanteur : «Tous mes amis reviennent, peut-être ne sont-ils jamais partis, ils étaient en moi et je ne l’avais jamais compris ; tous mes amis reviennent, nous ne nous sommes jamais séparés, et ils sont en moi, tous mes amis reviennent. Je suis un petit homme, sous un petit verre qui ne peut plus se briser ; je voudrais envoyer cette histoire en éclats de mémoire, de pensées, au moins pour un salut ; et avoir encore vingt ans, encore tout à dire pendant une minute. Je ferme les yeux plus fort que le temps, mais ne me quitte pas ; et je les vois soudain : loin, proches, les mêmes que mille soirs ; et j’entends leurs voix : la douce, l’aiguë, la faible, la désespérée ; et je dois demander pardon à quelqu’un, je me souviens… mais peut-être est-ce une connerie».
(Torre del Greco – Naples, 1957) Vit et travaille entre Milan, Italie et Paris, France
La plus grande part du travail de Gabriele Di Matteo se base sur des images et des objets trouvés. Di Matteo n’a pas l’intention de produire des images, mais d’interroger l’image en tant que catégorie. La seule particularité qui distingue sa pratique d’une autre pratique auto-analytique cohérente est que cette interrogation prend forme à travers le récit. Le récit que l’image comporte réintroduit la dimension métalinguistique dans l’œuvre, chose qui par ailleurs constitue l’un des traits les plus intéressants du travail artistique plus récent, où de toute évidence une sorte d’hérédité conceptuelle montre ses effets.